Professeur et chercheuse à Télécom Paris, Ghaya Rekaya-Ben Othman a fondé en avril 2021 MIMOPT Technology, une startup qui développe et licencie des solutions innovantes de traitement numérique du signal pour les communications optiques fibrées. Retour sur le parcours d’une chercheuse à l’esprit entrepreneurial.
Une scientifique avide d’innovation
Ghaya Rekaya a commencé sa carrière à Télécom Paris en 2001. D’origine tunisienne, elle est arrivée à Paris pour effectuer son DEA et sa thèse, à la suite de laquelle elle décroche un poste de maître de conférences à Télécom Paris. En 2012, elle obtient le grade de Professeur toujours au sein de Télécom Paris.
En 2010, « Désireuse de diversifier mon activité, précise Ghaya Rekaya, j’ai accepté la proposition de Christian Picory-Donné, directeur de la recherche partenariale et de la valorisation de l’Institut Mines-Télécom et directeur du Carnot Télécom & Société numérique, de monter un nouveau type de projet, une patent factory. Le but de ce projet était de développer un portefeuille de brevets en partant d’un noyau initial de 5 brevets. » Un projet audacieux et risqué.
Lors de cette première patent factory en collaboration avec France Brevets, Ghaya Rekaya et son équipe sont parvenus à construire un portefeuille constitué de 19 familles de brevets portant sur le décodage pour les systèmes de transmission MIMO (Multiple-Input / Multiple-Output).
« Le fait de déposer des brevets ne nous a absolument pas freinés dans nos recherches, affirme Ghaya Rekaya, avec mon équipe nous avons continué à publier nos résultats dans des conférences et journaux internationaux renommés. »
Devant le succès, il a été décidé de renouveler l’expérience et de lancer, toujours en partenariat avec France Brevets, une deuxième patent factory, cette fois sur le codage pour les fibres optiques, sujet sur lequel Ghaya Rekaya travaille avec son collègue opticien, le Professeur Yves Jaouen, depuis déjà quelques années. Elle précise : « Notre collaboration porte sur l’exploitation des degrés de liberté dans la fibre, en polarisation, en longueur d’onde ou encore spatiaux. L’objectif est de réduire les interférences entre les canaux parallèles. Dans le cadre de cette patent factory, nous avons construit un nouveau portefeuille de brevets composé de 14 familles de brevets. »
La naissance de MIMOPT
Très sollicitée par les industriels du domaine de l’optique-photonique avides de son expertise en DSP (Digital Signal Processing), Ghaya Rekaya souhaite travailler sur des concepts révolutionnaires et valoriser le travail des patent factories. C’est dans cet environnement qu’a germé l’idée de créer une startup.
Soutenue par le pôle Propriété Intellectuelle et Valorisation de Télécom Paris, Ghaya Rekaya postule à un appel à pré-maturation. Après une étude de marché, le verdict tombe : « C’est le bon timing, vous devez y aller. » Yves Jaouen et Akram Abouseif, le quatrième doctorant encadré par Ghaya Rekaya et Yves Jaouen, décident de la suivre dans ce projet de création. Le premier challenge à relever est de racheter les brevets à l’IMT et à France Brevets. Le deuxième défi est de gérer son statut. Ghaya Rekaya souhaite conserver son poste de professeur, mais également porter le projet de création de la startup. Grâce à la loi PACTE (Plan d’Action pour la Croissance et la Transformation des Entreprises), elle obtient une mise à disposition d’un an à 50 %, avec maintien de salaire.
Le 21 avril 2021, les statuts de MIMOPT Technology sont enfin déposés. Et les clients, opérateurs ou équipementiers en télécommunications, ne se font pas attendre.
Les technologies développées par MIMOPT permettent en effet d’augmenter les débits dans les fibres optiques aujourd’hui déployées grâce à des solutions de codage innovantes qui permettent de réduire significativement les interférences entre polarisation et longueurs d’onde. Cela ouvre d’intéressantes perspectives pour les infrastructures actuelles menacées de saturation.
De plus, l’équipe de MIMOPT travaille également sur des fibres multi-modes et multi-cœurs qui seront les fibres de demain. Celles-ci résoudront les problèmes de débit, à condition de ne pas engendrer de surcoût énergétique rédhibitoire. MIMOPT propose de répondre à cette problématique par des solutions de codage permettant d’économiser l’énergie injectée dans les fibres.